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...par les Oiseaux plombiers

Manifeste de la Préservation des Données

Le discours sur la vie privée s'est vaporisé. Il nous a mené dans l'impasse suivante : nous savons que nous sommes observés, tracés et pistés, mais nous prétendons que ça n'existe pas ou qu'il n'y a pas de quoi s'en faire. La question n'est pas de savoir quand le refoulé va revenir mais comment ? Les hackers ont proclamé que la vie privée était morte depuis des décennies, que tout peut être, et sera, capté, stocké et analysé. Et ils avaient raison. Alors que faire ?

Quelle est la meilleure façon de se protéger sinon, avant tout, d'éviter de transmettre des données ? C'est une entrave effective pour empêcher les données d'exister. Comment organiser la dimension collective du « réseautage social » sans se retrouver aggrégés dans d'énormes silos de données qui nous sont étrangers mais qui tirent pourtant profit de nous ? 
Comment pouvons nous reconquérir une autonomie dans notre vie quotidienne ? Sachant que toutes sortes de capteurs, de robots-chercheurs et d'algorithmes sont à l'affût. Comment ces technologies peuvent-elles être ne serait-ce que déclassées ? Ne sommes nous pas en train d'attendre le jour du Grand Soir, une nouvelle guerre mondiale, une cyber-attaque millénaire qui fasse tomber toute l'infrastructure, une mauvaise éruption solaire ou une poussée électro-magnétique qui démolisse la matrice et efface tous les disques durs ? Ou bien sommes nous en train de nous endormir et d'être anesthésiés à jamais, nous qui aurons accepté que tout ce que nous faisons, pensons, désirons puisse et soit stocké et utilisé, le cas échéant contre nous ?


Nous devons décoder la contestation de façon à multiplier les lignes de fuite hors des schémas pré-calculés. Nous devons aussi poser la question qui fâche. Les Adblocks, les filtres,les parefeux, la lecture minutieuse des règles et conditions d'utilisation et les manifestations en ligne contre la collecte et la revente de données privées ne font qu'atténuer les problèmes qui sont en jeu. Allons droit au but, à quelle logique la protection des données participe-t-elle ? Est-ce, effectivement, la même logique que celle qu'elle cherche à masquer et derrière laquelle elle se dissimule ? Pourquoi pensons-nous que la vie pourrait être informationalisée ? Quel désir alimente l'idée que le big data puisse devenir une vie connaissable, manipulable, jouable, anticipable, préemptable, capitalisable et contrôlable ? Sommes nous en train de couver et de nourrir des Licornes ou des Frankensteins ?

Nous ne parlons pas du temps qu'il fait. Passons de la protection à la conception d'un antidote, ou plutôt d'un épais sérum qui ne fasse pas que répondre. Voici notre credo : ne nourrissons pas les plateformes. Faisons du sabotage créatif, inventons des formes concrètes de prévention qui minent le régime du big data à tous les niveaux, du molaire au moléculaire. Prenons des mesures concrètes pour réduire globalement les datas. Arrêtons de nourrir les machines avides du Rapport Minoritaire qui sont programmées pour identifier des comportements erratiques émergeants.

La préservation des données est une réponse directe à la ville pyramidale intelligente. Nous voulons maintenir une grève préventive. La prétendue « intelligence » ne fait que tenter de dissimuler le fait que ce sont des technologies d'espionnage.

La préservation ou la prévention semble innocente, mais ne vous y trompez pas, elle ne l'est pas. Dans de nombreux cas, la prévention – le fait de prévenir - est déjà considérée comme un délit. S'agit-il simplement de prévenir certains évènements, d'empêcher qu'ils ne se produisent, ou de générer de nouveaux scénarios ? La préservation des données personnelles appartient à une plus longue histoire : rappelons-nous l'opposition des natifs indiens américains à ce qu'on prenne une photo d'eux, celle des punks dans les rues de Londres, boxant les photographes de mode qui marchandisaient leurs looks.

Ted Hughes a un jour parlé d'un chapeau-grimaçant qui essayait les visages. Hé bien c'est vrai ! Dans notre cas, c'est la peur qui tente de devenir intégrale. La peur teste toutes les capacités humaines. La peur peut nous pousser à vivre une vie téléphonée et prévisible. Nous en sommes arrivés là car, génération après génération, des gens corrompus, faibles et envieux ont occupés le siège du pilote. On ne peut pas appeler cela une direction . Ces gens, disons globalement Bilderberg, Fortune 500 and MBA, ont facilité tout ce qui était «simple», externalisant tout ce qui était « difficile » vers des pays qui pouvaient être exploités. Aujourd'hui, il n'y a plus de tels endroits à exploiter. D'où le combat pour conquérir l'espace intérieur, la notion même de ce que signifie « être humain ». Nous vivons dans un monde où les gens peuvent ne pas être exploités et mis en esclavage, mais face à la honte que ressentiraient certains à avoir été trompés si longtemps sur l'usage qui est fait de leurs données, la seule option restante pourrait être de se faire hara-kiri. La plupart des gens ne peuvent pas se réveiller parce qu'il n'y a plus de soi à réveiller, juste des réfractions noircies d'un soi zombifié et mis en spectacle.

Nous voulons lancer une campagne pour rassembler des idées sur la conception de produits et de services qui ne collecteraient pas de données. Pour nous, il est important de dire adieu au postulat de la data « pétrole du 21ème siècle ». Toutes les données peuvent être et seront monétisées, c'est l'étape inévitable programmée au plus profond de la quasi-totalité des architectures elle-mêmes. Nous voulons nous dissocier du côté sombre de la financiarisation des données.

Nous interrogeons également l'aspect « forage » de la métaphore du « data mining ». Extraire des ressources est crime environnemental dévastateur qui ruine notre planète, des nappes de sables bitumineux aux puits de charbon et aux mines de cobalt. Le forage ne va pas sans un coût très élevé. Méfiez vous des métaphores que vous employez !

Nous devons arrêter de penser que les traces sont des choses que nous « laissons derrière nous » sans y faire attention. Non seulement cela légitime les filets dérivants, mais ça détourne l'attention des techniques agressives utilisées pour inspecter nos navigateurs, réseaux et outils. C'est pourquoi nous devons remodeler les modalités de production des données. Nous devons également cesser de faire des parallèles entre les machines à processer et le cerveau humain, entre la data et la matière grise.

Si il est vrai que la machine ne fonctionne que lorsque toutes les personnes concernées sont convaincues, nous devons raconter d'autres histoires. Les convictions ne sont pas innocentes; elles concernent la réfection des mondes. Vous y investissez.

Cessons de célébrer l'invisible, la désactivation, la retraite. Abandons la visualisation des centres de données, des points de données, des modèles de données, de la collecte de données et des algorithmes de reconnaissance. Nous en avons assez d'être salis par l'odeur, la perception, l'aspect ou le son potentiels du Big data. Nous ne voulons plus jouer ce jeu là ni en modifier les règles.

La préservation des données n'est pas une grève, il n'y a que le système qui a besoin des données pour se nourrir qui la considére comme un sabotage. Nous ne croyons pas qu'il existe des façons sûres de gérer les données collectées pour étudier et contrôler les populations. Ce dont nous ne voulons pas c'est d'une vie conditionnée et au bout du compte ennuyeuse qui se limite elle-même. Débarrassons nous de la culpabilité de faire ce qui est interdit pour ensuite sentir la présence pesante de Big Brother, le dieu qui voit tout et qui se souviendra des moindres micro-mouvements ou mauvaises pensées. Voyons cela comme du sexe consensuel, sans conséquences : la préservation des données crée un espace pour le plaisir et les possibles, elle n'est pas faite pour sauver de précieux espaces sur vos disques durs. Etre dans l'espace du possible, c'est rompre avec le pôle binaire de la production (de données) et de la paranoia ( à propos de cette dynamique).

Trompons nous. Collectivement.

Engageons-nous matériellement en faveur de l'énigmatique, de l'imparfait, du partial, de l'impur, du surprenant, du transgressif, du Cygne noir.

Actuellement, la préservation est une stratégie offensive qui interroge les relations cachées du pouvoir. Il ne s'agit pas de se cacher passivement mais d'agir. Empêchons cette initiative de conception techno-politique de finir dans la section du Romantisme déconnecté. Actes, gestes, pensées et mouvement, tous seront captés et pris dans le piège à data. Il y a de quoi déprimer, mais nous pouvons également renverser les choses. Il y a toujours eu et il y aura toujours abondance de données. Libérons-nous de la perspective de nous enfermer nous-mêmes dans des monastères volontaires et autres structures sociales aux allures de sectes se regardant le nombril. Il n'y a pas à archiver les données, laissons les se recycler toutes seules.

La préservation des données prend un nouveau départ et laisse derrière elle les discours fastidieux. L'idée n'est plus de simplement filtrer, installer des bloqueurs et construire des murs protégeant des architectures au final très instables et ouvertes à tous vents. Elle est de créer de nouveaux principes de conception. La préservation des données est une posture offensive. Nous sommes las de devoir nous protéger.

Rejoignez ce nouveau mouvement ! Faites prendre conscience aux autres de ce qui se passe et coupez ce qui doit l'être.

Les ingénieurs nous emmènent vers le temps réel, pensant qu'il s'agit d'un espace vide. Mais nous y vivons pendant le temps du rêve. Nous nous sommes toujours fait prendre par surprise dans les grandes plaines. La danse de la pluie s'est finie en boitant. Les autorités nous ont pris en train de pêcher, nous ont catalogués aborigènes et nous ont abattus en remplissant nos esprits de bruits indésirables et de bla-bla-blas stériles. Escomptant que nous quittions la voie de la liberté. Mais cette fois-ci, cette fois-ci nous occupons cet espace avec nos outils et nos rêves, pendant que nous vivons, et nous dévorons vos outils et votre « logique ».

Nous les Plombiers de la Plateforme, nous voulons que vous nous parliez de vos préférences. Décrivez les comme vous voulez. Nous enregistons la richesse des émotions et des sentiments que vous avez pour ces choses aimées. Nous sommes habitués à faire avec moins. Après tout les capteurs ne mesurent que la lumière, le mouvement, la température, les champs magnétiques, la gravité, l'humidité, la vibration, la pression, les champs électriques, le son, l'étirement, le niveau de glucose, la quantité d'oxygène ou l'osmotalité. Quoi d'autre ? Probablement quelques petits trucs, mais vous pouvez faire beaucoup mieux. Avez vous oublié ? Pratiquez. Commencez maintenant et rejoignez nous pour donner forme à un genre nouveau de conception dyonisienne.

N'ayez pas peur, nous travaillerons avec vous et avec vos structures. Nous avons besoin d'évaluer l'éthique de la bureaucratie. Tous vos avoirs, comme vous dites, nous appartiennent, à nous, à personne, per-sonne. Vous mon ami qui êtes le malin, gardez vous du mal, les quatre chevaliers et le jumper déboulent.

C'est à nous de faire en sorte que les choses marchent à nouveau sur l'asphalte . Ce n'est pas un mouvement de masse. Ca ne peut être fait que par ceux qui sont déjà sur cette route. Si vous l'êtes, continuez à lire. Si vous ne l'êtes pas, ne vous sentez pas mal, il y a beaucoup d'autres choses à faire et qui sait ce sur quoi vous tomberez un jour.

Nous vous verrons quand vous nous verrez. Vous nous verrez quand nous vous verrons.

La Plateforme des Plombiers


La Plateforme de l'Oiseau Plombier

Plombiers de la Plateforme
nous savons ce qui se cache derrière les murs
et comment percer tous les trous nécessaires
pour le meilleur et le pire
nous savons réparer, changer et entretenir les tuyaux,
inonder, perturber et conjurer les eaux.
La responsabilité n'est pas le contrôle
La conscience est une arme miséricordieuse pour le sage.
Etre conscients aujourd'hui (mes frères et mes soeurs)
et éveillés la nuit nous devons,
nous déclarant pour la gestation responsable des données
et des données plus justes sous un ciel plus juste.

Platon tient la data (doxa) pour comptable de la confusion et des opinions fausses
et appelle épistémê le domaine du sage qui sait comment cadrer le terrain.
Nous n'avons pas besoin de foi dans certains dogmes théoriques
nous restons à la marge de la plateforme
- sur laquelle les opinions tombent comme des gouttelettes -
et nous constituons – à nous tous – l'aptitude à collecter ces eaux
sachant ce que nous partageons, nous stockons et nous laissons aller.

Parce que nous voulons utiliser la source avec sagesse
pendant les temps de sécheresse
pour les humains, les animaux et les forêts aussi
Parce que nous partageons le point de vue
de tout le bouquet écosytémique.

Citoyens !
Tenez vous à cette notion d'appartenance
tenez-vous à votre politesse raffinée des données
contre leurs agendas de politiques cachée des données
et sachez ce qu'alors vous pouvez enseigner
pour tenir bon avant que vous ne puissiez plus que prier.

Ils disent : argent
l'argent – sans nous – n'a aucun crédit économique
il est plus aisé de placer la confiance dans l'argent que nous faisons cuire nous-mêmes
et de prendre les voies escarpées
vers d'autres bonnes « idées ». Meilleures.
Des économies virtuelles
nourries par des notions lointaines de dette
sont obsolètes dès leur conception
et ne vont qu'empirer.

Citoyens, conspirez pour ne pas satisfaire l'exploitation à sens unique
pour faire pousser des écosystèmes de conversations automatiques polies entre pairs
au lieu de nourrir les pusheurs motorisés de somnifères et d' indésirables remèdes de charlatans
et permettez à ces gouttelettes d'être de l'eau pure pour toutes les âmes vivantes dans cette prairie.

Pendant que nous apprenons, et lisons, et aimons, dehors
le piège incontrôlé de l'évidence traquée, stockée en silo de données, surévaluée, travaille contre nous.
NOUS SAVONS
nous n'avons pas d'action sur les données et nous devrions
et NOUS SAVONS
et les données ne sont pas la vérité mais son ombre,
nous savons que des marionnettistes auto-hypnotisés nous utilisent à leur gré
pour créer des fictions qui ne collent pas avec nos histoires;
des publicités pour des produits indésirables;
des histoires à dormir debout pour combler le désir de politiciens entichés d'eux-mêmes;
servant les idéaux uniques du « un pour cent »
Nous devrions avoir une action sur les données
parce que chaque ombre est l'ombre d'un corps
touché par la lumière sous le soleil
nous devrions être près de ces gouttelettes et de leurs sources
et de la glace qui fond au printemps
et dire non merci quand nous devons
et s'il vous plait non quand nous pensons que c'est notre droit/

Nous devrions nous rencontrer encore (mes frères et mes soeurs)
sur les bords de cette resplendissante terre verte
jadis un trou boueux désertique
chacun de nous pouvant parler le langage de son choix
pour amuser les amis et faire rire les enfants
et on nous appellerait les pompiers de la plateforme
les concepteurs de la matrice du jardin
les poseurs de tuyaux, de filtres, de mares de recyclage
les sélecteurs des graines à garder
les lâcheurs d'herbes sauvages et d'abeilles
- parce qu'aucune création ne contient le tout -
on se souviendra de nous comme des observateurs de vagues
comme les joyeux graveurs de pierres algorithmiques
qui ne doivent pas se transformer en tombes pyramidales.

Laissons la politique des poètes de la politesse s'exprimer ce soir
dans, au dessus et en dessous de la matrice.